Bamako, 22 juillet 2025 – Dans un rapport accablant publié ce mardi, l’ONG Human Rights Watch (HRW) documente une série d’exactions graves impliquant l’armée malienne et ses alliés du groupe paramilitaire russe Wagner – récemment rebaptisé Africa Corps. L’organisation de défense des droits humains dénonce au moins 12 exécutions sommaires et 81 disparitions forcées de civils, principalement issus de la communauté peule, survenues entre janvier et juillet 2025.
Selon HRW, ces actes auraient été commis lors d’opérations antiterroristes dans plusieurs régions du centre et de l’ouest du Mali, notamment à Ségou, Douentza et Kayes. Les victimes, pour la plupart des hommes peuls – éleveurs ou commerçants – ont été accusées sans preuve, selon l’ONG, de collusion avec des groupes djihadistes affiliés à al-Qaïda, comme le Jnim (Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans).
« Ces abus reflètent une stratégie de répression ciblée et systématique, contraire au droit international humanitaire », déclare Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior pour l’Afrique à HRW.
Témoignages glaçants, silence des autorités
L’enquête repose sur des entretiens menés avec plusieurs dizaines de témoins directs, chefs de village et habitants. HRW mentionne notamment des incidents survenus à Bélidanédji et Kourma en mars, où des civils ont été exécutés sur place ou emmenés par des militaires sans que leurs familles n’aient eu de nouvelles depuis. En janvier, dans le village de Kobou, des corps ligotés et les yeux bandés ont été retrouvés, tandis que plusieurs habitations étaient incendiées.
Le cas le plus dramatique concerne Sébabougou, dans la région de Kayes. Au moins 65 éleveurs et commerçants peuls y auraient été exécutés sommairement en avril, selon HRW et des sources corroborées par les Nations Unies. Ces morts ont été signalées quelques jours après des arrestations massives lors de la foire locale, suivies de la découverte de cadavres non loin du camp militaire de Kwala.
Malgré des sollicitations formelles, ni le ministère de la Justice, ni celui de la Défense maliens n’ont répondu aux demandes de clarification de Human Rights Watch.
Un climat d’impunité persistant
Ce n’est pas la première fois que l’armée malienne et ses partenaires étrangers sont accusés de graves violations des droits humains. Depuis le retrait des forces françaises et la montée en puissance de Wagner/Africa Corps dans les opérations militaires, plusieurs ONG et institutions internationales s’inquiètent d’un climat d’impunité grandissant.
HRW appelle les autorités maliennes à ouvrir sans délai des enquêtes indépendantes et à garantir la protection des civils, toutes communautés confondues.
« La lutte contre le terrorisme ne peut se faire au prix d’exécutions arbitraires ou de disparitions forcées. Ces crimes doivent faire l’objet de poursuites », insiste l’ONG.
Dans un pays marqué par une instabilité chronique et des tensions ethniques persistantes, ces nouvelles révélations risquent de raviver la méfiance et les divisions, compromettant davantage les efforts de réconciliation et de paix nationale.
Source : ONG Human Rights Watch (HRW)
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